Rolling Stone

Impression prégnante de lutter contre la dégringolade, de tout faire pour m'en protéger. L'image est assez pauvre, mais c'est celle qui s'est imposée à mon esprit et sur laquelle je brode pour essayer de donner un sens à ma vie du moment : je grimpe la côte d'une montagne, presque une escalade, avec le sentiment que le fait même de ne pas m'obliger à mettre avec constance un pas après l'autre me fera basculer et m'emmenera  bien loin en arrière du chemin déjà accompli. Une obligation de discipline et de méthode, d'effectuer les gestes a-ordinaires comme les plus quotidiens sans pouvoir se laisser aller et se permettre de pause. Parfois tout de même un peu de repos mais imprégné par la conscience inquiétante de son caractère impermanent. Sysiphe fut condamné par les Dieux à emmener au sommet de la colline son rocher qui tout en haut retombait et roulait jusqu'au bas. Pour moi, il me semble devoir pousser aussi sans fin mon propre rocher, car si dans les temps d'espérance je crois apercevoir le point culminant et même dans les temps du triomphe y parvenir,  tout cela m'apparaît comme très vite illusoire. Le rocher n'est pas redescendu mais je dois l'amener plus haut encore avant qu'il ne m'écrase. Charmante vision qui me laisse essouflé le matin, éreinté le soir.